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la plage de Robinson - Page 9

  • la fille elfe ...

    L'eau coule, claire, au long du lit de la rivière. Des cristaux de lumière scintillent aux éblouissements solaires. Des feuilles d'or bruissent au vent de l'automne. L'air sent le frais, et l'odeur du bois parcourt les rives moussues.

    Elle s'est assise sur un grand galet de granit, après y avoir posé quelques feuilles sèches pour la délicatesse de son confort. Ses jambes menues et fuselées pendent vers l'onde, et ses pieds touchent l'eau. Elle a replié ses ailes diaphanes, comme un châle sur ses épaules. Elle regarde la course de l'eau, elle se fascine à découvrir les traits sombres des poissons qui filent entre les rochers.

    Elle a posé ses mains sur ses cuisses, comme un appui doux pour se pencher, en forme d'interrogation, comme pour questionner l'eau... Puis, sans doute à force de sentir un regard sur elle, elle tourne sa tête de chaque coté, cherchant sous les frondaisons celui qui l'épie, devinant une forme de visage derrière un buisson de houx ou devinant un craquement de branche morte dans la forêt alentour. Mais non, elle ne me sait pas ici. Avec un dernier regard frissonnant vers le ciel, elle reprend son observation. Le petit martin pécheur qui surveillait le courant jette un "pîîîp" de connivence, puis sautille sur un autre observatoire. Elle a ramené ses bras à toucher ses épaules, enfermant de petits seins naissants dans un nid de chaleur retrouvée, pour faire obstacle à la fraîcheur de la rivière. Elle s'est recroquevillée sur le lit de feuilles. Elle reste là, pensive...

    Le bruit de la forêt semble devenir assourdissant, tant le silence occupe l'espace. Le temps ne compte plus, une éternité s'installe. Et là, quand la torpeur du lieu a fini d'engourdir les sens, une voix flûtée s'élève, douce et puissante à la fois. Elle chante. Une ballade gaélique apprise depuis de longues années, avec ses particulières notes, ses trilles serrées, son refrain si doux...

    Elle raconte l'aventure d’une Elfe comme elle, si fragile et si seule, oubliée par les temps dans une forêt immense. Elle chante ses espérances et ses prières, ses douleurs de vivre sans personne à qui parler. Elle raconte une lente mélopée, aux accords d'une harpe, de ces temps où les elfes pouvaient mourir d'amour, rien qu'au parfum d'une rose, un temps où les bois étaient aux mains des hommes, quand les elfes se terraient en des lieux maudits, en attendant l'avènement du soleil, le retour des oiseaux, en attendant la paix.

    (Pour Wind ...)

  • Quand vient la nuit

    La nuit, je ne la vois pas. Quand je me lève, elle est encore là, et quand je m'écroule dans mon lit, elle n'a pas bougé. Je me concentre sur les écrans, je scrute, je cherche des machines, j'écris, je déchire, j'écris
    encore, puis je passe d'un logiciel à l'autre, je réponds au téléphone, les yeux rivés sur des écrans ...


    Riff Cohen ajoute ses mélopées yeménites en bruit de fond, en boucle. Cette voix de fille, rocailleuse et douce comme le désert me jette dans des songes instantanés au bord du wadi, où tout est encore vierge, où tout attend, comme une promesse de rêve, des visions d'oasis, d'ombres fraîches.

     Des fois je m'évade pour un rendez-vous, une course, comme si hors d'ici il n'y avait plus rien, alors que tout est plein de couleurs, de vie, d'odeurs. Je ne vois plus les heures passer, je mange comme un voleur de poules, je me surprends à sentir mon odeur de sueur, moi, si immobile, si statique ....

  • Mariages et Fondations

     Tous ceux qui ont une expérience sociale en contact avec des familles et des enfants savent que les compositions familiales sont pratiquement toutes imparfaites. Mieux, le choix de composition d'un foyer homoparental est d'autant plus significatif et plus respectable qu'il n'est pas (jusqu'à ce jour) dans la "norme", et donc sujet à des difficultés innombrables, ce qui montre que celles et ceux qui le créent sont suffisamment motivés et conscients de leur engagement familial, tant en terme de responsabilité que d'engagement relationnel avec leur partenaire et les enfants qui viendront agrandir leur foyer ... peu importe par quel mode ils y arriveront.

    Lorsqu'on sait les ravages provoqués au sein des enfants et des générations suivantes par des couples hétérosexuels mal apparentés, mal aimés et mal aimants, mal choisis, aux grossesses subies, aux enfants supportés parce que pas attendus et désirés, on peut se dire que les foyers homosexuels ne feront de toutes façons pas pire que les autres, beaucoup plus probablement mieux, puisque leur choix de fonder une famille est obligatoirement un choix "actif", aucune grossesse ne pouvant dans ce cas d'espèce être "subie", et aucune adoption n'étant faite (par principe) de force ou sous une menace quelconque.

    Voici donc déjà deux "à priori" qui doivent dans l'absolu plaider en faveur de cette loi.

    Mon père était éducateur dans un centre pour enfants placés par le juge des mineurs. J'ai vécu à leur contact, et je crois bien connaitre ce milieu, où se retrouve une grande partie de ces enfants "épaves", tristes résultats de foyers incapables de les éduquer, de les aimer, de les protéger, triste démonstration que les "hétéros" n'ont vraiment pas de leçons à donner en terme d'éducation...

    Ma culture catholique, mon attachement à une logique "biologique" de fondation d'un foyer m'ont fait longtemps penser que le rapprochement d'homosexuels en terme de choix de vie commune, puis de fondation d'une famille était une "hérésie" face à ce que la nature prévoit dans sa "normalité". Mais à la réflexion (qui n'a pas été simple !), la comparaison biologique s'arrête là: dans les faits, le rapprochement de personnes qui s'aiment vraiment, et qui fondent une famille avec des conditions d'accueil des enfants qui présentent autant de difficultés ne peut pas être socialement moins "efficace" au sein d'une communauté de vie homosexuelle que dans les autres foyers, prétendus normaux.

    Qu'ils soient assurés du respect que l'on doit à celles et ceux qui vivent avec de l'amour et qui donnent du sens à leur vie.
     
    ©D.BRUCH - 02/2013.

  • conseil à ma fille

    Comme une hampe d'orchidées écloses,

    Monte vers le ciel,

    Relève la tête vers l'horizon.

    Montre autour de toi la beauté de tes gestes,

    L’élancé de ton bras,

    Que d'autres voient ton corps.

    Fais preuve d'arrogance pour fleurir,

    À leurs yeux sois la plus belle.

    Eblouis leur regard par tes couleurs

    Pour les rendre heureux

    De te savoir si belle.

    © D. BRUCH . 12/2008.

  • Le pire de tous les péchés

    mai 2009 022.jpgNous sommes condamnés à la solitude internétique, au dialogue par boutons de plastique interposés, chacun écoutant un mp3 quelconque dans son bureau, casque sur la tête, enfermé dans la clim ou le chauffage, isolé du monde, ne laissant filtrer par la vitre numérique que ceux et celles qu'il veut bien accueillir, et encore, à condition que quelqu'un réponde à son appel, souvent muet, agrémenté de niaiseries la plupart du temps pour faire croire à tout le monde que tout va bien.

    Mais on sait tous que c'est pas vrai, on sait tous que nous avons tacitement accepté de nous enfermer dans notre commodité de relation, celle qui ne fait ni mal ni bien, celle qui n'exige rien de soi, enfin, rien d'autre que de satisfaire l'immense détresse qui nous assaille lorsque, à la nuit tombante, on s'aperçoit que plus rien ne bouge autour de nous...

    Et là, l'espace d'un instant, la terreur nous prend à la gorge, à voir le vide tout autour, comme une mort rodante. On se tait, cette douleur-là ne dure qu'un instant. Vite, on reprend le dessus, on regarde ailleurs, on va vite se réfugier dans l'avenir en faisant des projets fous qui ne verront jamais le jour, ou alors on va chercher une accroche de souvenir, pour se soûler avec toute la soirée, mater une photo jaunie, la scanner, la partager avec des gens qui en ont rien à foutre, et se faire croire que c'est important ce moment-là. Et puis la nostalgie revient, comme une gueule de bois d'alcoolique. On se prend à sortir, à regarder les gens, et à regarder les gens nous regarder, à voir qu'on est devenu quelconque, comme on a toujours été, finalement.

    On passe dans la rue comme des fantômes, qui croisent d'autres fantômes, qui eux aussi ont fini par croire que la vraie vie est un fantasme électronique qui ne peut se partager qu'à travers un écran. Mais là, dans la queue de la boulangerie, on ne se dit même plus bonjour, on se suit en silence, jusqu'à la caisse, pour passer la carte dans le monéo, prendre son pain et filer dans le gris de la pluie retrouver les couleurs de l'écran...

    (robinsondesiles - les noces d'Algies . 08/2012)

  • 2012 : durable ou fin du monde ?

    DSC02979.JPGDes choix d'énergies...

    Si le monde disparaissait dans moins d'un an, comme certains le disent, alors rien ne changerait dans l'univers. La taille de l'entropie terrestre est bien trop minuscule pour entamer l'équilibre enthalpique du système solaire.

    Quant à l'homme, sa puissance énergétique individuelle n'est que de 0.01 watt par mètre carré. Tout le reste n'est que le déplacement d'énergies actives ou potentielles qui étaient là bien avant son apparition.

    Ceci amène quelques réflexions:

    -1- la vanité de l'homme à croire que son activité pourrait modifier l'allure énergétique de la planète qui l'abrite est incommensurable.

    -2- la simple comparaison de l'entropie humaine avec le reste de son environnement montre qu'à part son imagination, l'homme n'est capable que du rêve de sa grandeur.

    En conclusion, soyons modestes, et souhaitons-nous mutuellement de profiter humblement de la chaleur solaire en hiver, et de la fraîcheur à l'ombre des platanes en été ...

    Toni, remets-nous un pastis !

  • Voeux 2012

    Qui sait combien de jours nous pourrions ajouter à nos vies en le souhaitant, simplement ?

    Qui sait quelles défenses nous pourrions ajouter à notre santé en se mettant sous la protection des étoiles ?

    Qui connait mieux le chemin du désert en suivant les traces du firmament à la nuit ?

    Moi ?

    Certainement pas !

    Mazel Tov * , donc !

    Mazel Tov = "que la constellation te soit favorable" .... ( a, b, c, d, e, f )



    (a) sur Google chrome, le mot "voeu" n'est pas accepté au singulier, et les définitions les plus courantes n'en parlent qu'au pluriel.

    (b) le 1er janvier est une date arbitraire, plusieurs fois "remaniée" depuis le début de l'ère chrétienne, en principe basée sur la circoncision de Jésus, et non sur sa naissance (c'est le paradoxe de l'ère chrétienne, animée par le rejet du sémitisme mais basée sur son fondement principal, la vassalisation d'un peuple à son dieu par la circoncision).

    (c) même si cela n'a rien à voir, il faut faire le rapprochement entre la fameuse formule du roi David, reprise plusieurs fois par les prophètes "pour Dieu, un jour est comme mille ans", et replacer la fin du monde chrétien "au troisième jour", c'est à dire à la fin du deuxième, en faisant référence à la "prophétie" de Jésus ("vous détruirez ce temple, je le rebatirai en trois jours"). Mathématiquement, et partant du 1er janvier de l'année 0, jour de l'identification officielle de Jésus (la présentation au temple, la circoncision, ou bat milah) le "troisème jour" commencerait le 1er janvier 2033. Pour le comprendre, il faut savoir que l'annonce a été faite en 33 au jardin des oliviers, un certain jeudi saint. La fin du "monde" n'est donc pas pour 2012 ...

    (d) faire des voeux remonte à l'aube de l'humanité, à une ère ou le mot "si" n'existait pas (genre "si j'étais riche ..."), car le futur n'était pas encore une donnée perceptible pour nos ancètres. On ne pouvait se référer qu'à ce qui servait à la fois de télé et de cinéma à l'époque : le ciel.

    (e) on fera référence à l'excellent livre de Chantal Jègues-Wolkiewiez "sur les chemins étoilés de Lascaux" Ets la pierre philosophale, isbn 978-2-36353-013-4 .

    (f) pour qui étudiera sérieusement tout ce qui est écrit là, une année entière ne sera pas superflue. Bonnes méditations, donc !

  • soleil d'hivers

    Le soleil cette fois-ci m'a suivi le long du ruban gris de l'autoroute, dans une course nouvelle entre deux villes endormies par l'hiver finissant. Hier, c'était les aurores répétées qui jouaient de ma mémoire.

    Ces levers de soleil pointant à l'horizon au loin du bord rond de ma planète, jaillissant dans la vitre de l'avion, au-dessus du monde, au dessus de tout, silencieux présage d'un jour nouveau, éveil d'une appartenance pesante à la gravitation. Mais là, il est loin aussi, mais de l'autre coté : il rougit en tombant dans un rideau de brumes horizontales, pendant que je surveille la route au devant, en suivant les lumières rouges qui bougent.

    Dans le poste, ils parlent de paysages qu'ils ne connaissent pas, mais que j'ai foulé de mes pieds longtemps avant eux: ils disent des mots de guerre, alors que j'avais marché jadis dans le sable du silence, et bu l'eau des puits avec la paix posée sur le visage des bédouins. Ils disent des présages atroces en parlant de peuples qu'ils n'ont jamais côtoyé, jamais aimé donc, alors forcément ils ne savent pas de quoi ils parlent.

    Ceux que j'ai connu sont peut être déjà morts, assassinés par les famines, rongés par des maladies inconnues, ou simplement sacrifiés au nom du droit de la force des autres. Et s'ils ne sont pas morts encore, alors je partagerai leurs prières dans les temps à venir, pour partager aussi l'eau qu'ils m'avaient offerte, le pain qu'ils avaient cuit pour moi, la tendresse que leur regard m'avait donné.

    Mais aujourd'hui, mon amour pour eux ne leur parviendra pas, sinon par les brouillards des songes qui commencent de hanter mes nuits.

    (c) 01-2003

  • Ce monde qui nous tue

    Nous sommes à l'aube d'un nouvel ordre mondial pire que ce que nous avons connu. l'arme monétaire remplace dès à présent les balles des mitrailleuses et le gaz des nazis. Les gens vont mourir de faim, de désespoir, de suicide, d'ennui, de dégoût, sans que leur doigt accusateur puisse mettre un nom sur leur bourreau.

    Le système pour lequel nous avons "laissé faire" commence à nous tuer. Il y a mille ans, les seigneurs violaient nos jeunes épouses, saccageaient nos champs, nous réduisaient en esclavage, nous soumettaient à la misère... 

    Qu'est-ce qui change aujourd'hui ? nous ne voyons même plus ce que nous avons gagné: nos salaires sont virés sur un compte invisible, composés de chiffres et de codes, nos achats sont payés de manière invisible, et ce que nous mangeons suffit à peine à nous faire croire que nous sommes vivants, tellement le gavage de produits impersonnels nous rends invisibles à nous-mêmes. Et ce qui reste retourne inlassablement dans la roue du système: taxes, impôts, cotisations, amendes .... sans que nous ayons l'espérance que cela serve à quelque chose au terme du bout de nos actes, au terme de la force de nos vies...

    Il ne resterait qu'une alternative, qu'une espérance, puissante, qui deviendrait de plus en plus forte, de plus en plus indispensable à notre survie : croire que tout cela n'est qu'un cauchemar, que ce que nous croyons tous au fond de nous-mêmes viendrait avant que nous soyons, nous et nos enfants, et les enfants de nos enfants, définitivement désespérés ? 

    Ce Dieu lointain... si lointain....

  • La bêtise

    La bêtise ne triomphe jamais, elle rampe, lèche, suce, bave, salit, corrompt, et lorsqu'elle a usé de tous ses artifices, elle redevient poussière aux pieds des fantassins.

    On l'évite comme un serpent, comme un étron au milieu du chemin, et lorsque par mégarde elle s'est collée aux semelles, il faut alors la supporter, malgré son odeur et la gène qu'elle provoque, jusqu'à ce que la marche en ait fini avec elle, et que les miasmes qu'elle a produits disparaissent dans la pulvérulence minérale soulevée par le convoi.

    (Robinson des îles : réquiem pour un âne)