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révolution

  • Les patayos: -2- Les pieds au mur

    pieds au mur.jpgSi certains français de Martinique ont des volontés politiques marquées, s'ils ont des idées d'émancipation, s'ils souhaitent partager leur amour indéfectible d'une liberté de pensée ou d'opinion, tout en restant dans leur pays de naissance qui (qu'ils le veuillent ou non) appartient à la France, alors ils seront respectés, adulés parfois, dans tous les cas écoutés.

    Le texte cinglant de Raphael Confiant ( lire en annexe ci-dessous) est d'une illogique implacable. Je ne doute pas que les quelques milliers d'agitateurs et de bloqueurs de zones économiques vitales qui ont "agi" entre les mois de février et mars 2009 aient tous voté pour le OUI à l'adoption de l'article 74 de la constitution française. Ils sont très probablement parmi les 32 453 votants adeptes du OUI.

    Ils étaient bien moins nombreux dans les rues de Fort de France à faire fermer les commerces sous la menace de pillages ou à bloquer les zones commerciales. Et effectivement, ils l'ont fait avec la complicité lascive des autorités, manipulées probablement par le machiavélisme Sarkozien qui voyait là une bonne opportunité pour monter un coup politique et une manipulation de grande envergure.

    Le résultat du referendum en est aujourd'hui la preuve éclatante.

    Mais voilà : ils ne sont pas seuls. Ils sont ce qu'on appelle une "minorité agissante" . Laquelle ne tient pas devant l'inertie pacifique de la démocratie. 126 648 autres français de Martinique ont dit NON. Peut-être ont-ils eu en arrière pensée que sous une autonomie partielle un autre coup d'état serait possible avec encore moins d'acteurs... et encore moins de protection...

    Ceux qui ont dit NON sont probablement les mêmes que ceux qui ont été assignés à résidence pendant plus d'un mois, probablement les mêmes salariés aujourd'hui chômeurs par la seule faute de ceux qui ont voté le OUI franc et massif des patayos.

    Ceux qui ont dit NON sont les Tamoins et les Tanous, ceux qui construisent chaque jour la Martinique avec autre chose que des paroles utopiques ou des mensonges truqués par les vitrines des fausses libertés environnantes: Cuba, Haiti, Saint Domingue...

    Ceux qui ont dit NON sont les milliers de familles désemparées, privées de toute espérance, privées des droits les plus basiques: se déplacer, travailler, apprendre.

    Ceux qui ont dit NON sont les artisans, les commerçants, les professions libérales, ceux qui ont perdu leur droit légitime à gagner leur vie par leur propre travail.

    Non! Tous ceux-là ne sont pas titulaires, comme l'auteur Confiant, d'un poste dans une administration de l'état français, qui octroie plus qu'un salaire, une vraie pension, augmentée de 40% de la valeur travail, à des gens qui seraient probablement incapables de gagner le même salaire s'ils travaillaient dans le "vrai" monde du travail : celui de l'effort, celui de la concurrence, celui de la jungle des affamés de la vie, celui des diplômés sans travail.

    Les insulter de la sorte relève d'inintelligence. Ceux qui devaient dire OUI l'ont fait. Mais ils ne sont ni le peuple, ni même le ferment du peuple, car le levain qu'ils portent est un poison qui détruit, un virus qui étouffe, une fausse espérance, une insulte au bon sens et à l'intelligence.

    Les insulter, c'est reconnaître sa propre impuissance, c'est porter en soi la fange excrémentale qu'on ose vomir sur ceux qui ont été probablement les plus cohérents avec leurs idées, c'est admettre que ceux qui ont porté ces idées-là en matière de dogme irrésolu ne sont pas des démocrates, mais des hommes violents, de futurs tyrans sans doute.

    Mais par dessus tout, ce molard craché à la tête de nos concitoyens permet de mesurer la vraie valeur de la démocratie, le vrai poids du nombre. Et par comparaison, l'étrange sensation que le venin peut sembler salutaire à petite dose, mais qu'il est bel et bien mortel dans son essence.

    Un jour, il faudra que Monsieur Confiant nous raconte sa petite enfance, qu'il nous parle de "ce peuple" qui est le sien, et comment il a pu vivre au milieu de "sous-merde, un ramassis d’aliénés, d’alimentaires et de lâches. Une tâche sur la carte du monde, une salissure. Un étron." (sic).


    annexe: le texte paru le lundi 11 janvier 2010 par la rédaction de Montray Kreyol

    « PÉYI-A SÉ TA NOU, SÉ PA TA YO ! » (« CE PAYS EST À NOUS, PAS À EUX ! »), CLAMAIENT-ILS EN FEVRIER 2009…


    Jamais à Cuba (communiste), ni à Barbade (capitaliste) Saint-Domingue (social-démocrate), on ne verrait le pays bloqué durant plus d’un mois à cause d’une grève générale.

    JAMAIS!

    Au bout d’une semaine, les forces de police ou l’armée débloqueraient les routes, rouvriraient les commerces et entreprises, rétablirait la libre circulation des personnes et des marchandises. Il n’y a que dans ces colonies de consommation que sont la Martinique, la Guadeloupe et la Guyane qu’une telle chose est possible. Dans ces OVNI politiques, le Papa Blanc autorise ses chers enfants nègres à brailler, défiler, réclamer, exiger autant qu’ils le veulent. De toute façon, personne ne mourra de faim! Il les autorise même à proclamer que «le pays leur appartient désormais» et que le temps de la «profitation» est fini et bla-bla-bla…

    Le Papa Blanc se marre. Ses enfants nègres ne sont pas sérieux. Ils ne croient pas un mot à ce qu’ils disent. D’ailleurs, pourquoi ont-ils «déboulé» en février, mois du carnaval, et pas en octobre ou en novembre? La preuve: quand on leur organise une consultation pour savoir s’ils seraient prêts à entamer un tout petit début de commencement d’autonomie, ils battent aussitôt en retraite comme des «crabes-c’est-ma-faute». Oublié le «Péyi-a sé ta nou!»! Aux orties les rodomontades du genre «Jou nou ké ajounou pòkò wè jou»!

    Tout le monde aux abris!

    73% de «NON» en Guyane et 80% en Martinique. Donc si l’on comprend bien, les mêmes qui ont défilé et braillé en février pour faire plier l’État «colonialiste» votent aujourd’hui comme un seul homme pour rester à jamais enlacés dans les bras de ce même état colonialiste. Français jusqu’ad vitam aeternam, voilà ce qu’ils veulent être et rester!

    À ces gens, je dis: allez vous faire foutre! À ce peuple, je dis qu’il n’est qu’une sous-merde, un ramassis d’aliénés, d’alimentaires et de lâches. Une tâche sur la carte du monde, une salissure. Un étron.

    Je comprends pourquoi vous ne voulez ni de l’autonomie et encore moins de l’indépendance. Dans un Martinique libre, comme à Cuba, à Barbade ou à Saint-Domingue, jamais vous n’auriez été autorisés à foutre la merde et à bloquer tout le pays pendant plus d’un mois.

    Vous avez raison: restez français jusqu’à la fin des temps et continuez à brailler et à manifester régulièrement pour que le Papa Blanc vous accorde 200 euros d’augmentation de salaire et n’augmente pas le prix de l’essence, même si le cours du brut augmente sur le marché mondial.

    Adieu (ou plutôt «Au Diable!»)…

    Raphaël Confiant

  • Les Tamoins, les Patayos et les Tanous

    devise shadock 01.jpgEn Martinique, le slogan des évènements de février 2009 était: "matinik cé patayo, matinik ceta nou":
    (la martinique c'est pas à eux, la martinique c'est à nous) .

    De ce slogan, j'ai tiré 3 profils:
    les "tamoin" (à moi),
    les "patayo" (pas à eux),
    les "tanou" (c'est à nous)


    le "tamoin" : Martiniquais de souche, ou "étranger" qui s'est installé depuis longtemps, il travaille pour son compte ou est salarié dans le privé: il travaille beaucoup, participe à l'économie du pays, a réussi à mettre un peu d'argent de coté, s'est acheté un bout de terrain ou a hérité, s'est construit par les moyens du bord sa petite maison. Il adore la France, est fier de son passeport, paye tant bien que mal ses impôts. Il tient au statut de son île, déclare facilement que ce qu'il a, il ne l'a volé à personne, et revendique que la Martinique "c'est à moi" (cé ta moin)

    le "patayo": Martiniquais de souche ou "négropolitain" revenu au pays, il travaille (si l'on peut dire) dans une collectivité municipale, départementale ou régionale, ou encore est "fonctionnaire" de "l'Administration". Il revendique avec force les 35 heures, touche les 40% de vie chère, avec lesquels il investit dans l'immobilier défiscalisé. Lorsqu'on lui reproche d'en faire le moins possible, il répond avec fierté que ce que lui donne l'Etat (ou les collectivités) - c'est à dire l'argent des autres - est en fait la "réparation", qu'il considère comme un dû, bien que ni lui ni son grand-père n'aient jamais été les esclaves de personne. Il râle contre la vie chère que son propre salaire a aidé à créer, fustige la "justice" mais se comporte en tyran avec ses locataires pauvres, invective l'artisan qui travaille pour lui, ne paye pas ses factures et malgré tout roule dans des autos haut de gamme, le plus souvent fabriquées en Allemagne. C'est le partisan idéal et incontournable des évènements de février. Sa revendication consiste à rejeter ce qui ne lui ressemble pas: "Matinik cé pa ta yo" : la Martinique ce n'est pas à eux. Mais il ne dit pas qui son les "yo"... on se doute qu'il parle des "tamoin", mais ce n'est jamais clair ... quand à dire que ce sont les tanou, il s'en défendra toujours, respect de castes oblige ...

    le "tanou": Martiniquais de souche, souvent xénophobe "par le haut" (il est allergique à toute concurrence), le tanou est ancré depuis des siècles sur les roches visqueuses qui bordent l'île, souvent face à l'atlantique. Le tanou sait saisir les opportunités, traquer les monopoles, et surtout s'en servir. Il connait les rouages du commerce, les leviers des subventions, les ploiements nécessaires aux obéissances serviles, les mots endormeurs pour les politiques, les acquiessements aux promesses sociales, mais il sait surtout le sens des flux économiques. Il dit oui aux patayos pour augmenter les salaires, du moment que ce n'est pas lui qui débourse l'argent, et du moment que cet argent se retrouvera de toutes façons dans ses affaires, magasins, grande distribution, entreprises de services. Le tanou a le menton haut, la sympathie du requin, et se targue d'une chevalière portant des armoiries souvent ramassées dans les poubelles du royaume de france, seigneuries ou baronnies balayées par les guerres et la révolution, dont la particule n'a pas plus de valeur que la voiture allemande que conduit avec fierté le patayo d'en face, que le tanou lui a vendue, bien entendu.

    Le tamoin représente la plus grande partie de la population. Il détient le pouvoir social et économique, mais il ne le sait pas. Il pourrait faire changer les choses, mais le temps qu'il devrait y consacrer mangerait celui qu'il consacre à son travail. Le tamoin est rustre, il n'aime pas trop la compagnie, se méfie des grandes messes et des foules. C'est ce qui fait sa perte.

    Le patayo représente le pouvoir social actif: les patayos ne sont pas nombreux, mais ils parlent fort, s'agitent souvent, et consacrent plus de temps à la gesticulation sociale qu'à la tâche que leur octroie leur condition professionelle. Comme il ne travaille pas beaucoup, le patayo a le temps de comparer comment vivent les tamoins et les tanous, et il ne comprend pas bien comment ils arrivent à être heureux alors qu'ils travaillent plus que lui. Le patayo est un as du rassemblement, il sait faire vibrer la corde de la solidarité et faire croire que ce qui est donné pour la "cause" est juste et sera tésaurisé au paradis des gogos.

    Le tanou a pour lui l'inertie immense des patayos et la faiblesse des tamoins: ainsi il peut faire tranquillement ses affaires, cibler ses victimes, et remplir ses poches tranquillement. Le tanou utilise la Martinique comme une mine, mais il a placé ses interêts ailleurs, à Paris, en Chine ou aux USA. Le tanou passe ses dimanches à attraper son cancer de la peau en grillant sur le roof de son bateau, sait faire des réunions secrètes, sait tenir sa langue, sauf quand il a trop bu après avoir été invité par des journalistes de "là-bas". C'est un spécialiste des contre feux et des diversions, un homme de l'art, que Machiavel aurait pu citer.

    En février 2009, les patayos ont lancé une révolution: ils voulaient que les tamoins continuent à travailler, mais en leur donnant le fruit de leur travail, et que les tanous continuent à les fournir en denrées alimentaires et autres, mais sans faire fortune.

    Ce fut un échec.

    (fin du premier épisode)