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sur la rive du Jourdain

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Chers amis,

Je vous écris depuis la berge du Jourdain, des milliers d’années après que Moïse a ordonné à mes ancêtres de traverser ce fleuve incongru qui jette l’eau des montagnes sacrées dans une mer qui n’en n’est pas une, qui ne doit son sel qu’aux résurgences passées, qu’à la colère divine qui a détruit Sodome. Je suis sur la rive Est et je prie, et les galets ronds roulés par le temps attendent la prochaine tempête pour rouler plus loin, encore plus loin.

Hier ma vie a changé. Après 40 années d’errance dans un monde laïc et idolâtre, un monde dans lequel je cherchais D.ieu comme un aveugle, j’ai soumis ma raison au jugement des sages, et ils ont reconnu la lumière que je m’efforce de conserver dans mon âme, pauvre et chancelante parfois, brûlante comme un feu à d’autres moments, qui me consume depuis ma jeunesse,  et que je ne peux dominer que si je la partage avec d’autres.

Alors ce que je ne voulais pas admettre comme une évidence est arrivé. Ce que je croyais être une simple étape de ma vie est devenu la consécration de tout ce que j’ai rendu sacré depuis que je suis capable de comprendre. Ils m’ont dit « lève-toi ! » et je me suis levé, incrédule et surpris, débordé par une émotion que je n’avais pas connue. Et les mots que j’avais si souvent entendus ont coulé dans ma gorge comme un miel nouveau : « shema Israel, A.donaï éloénou, A.donaï ehad ».

Je suis assis, là, sur la berge, attendant que vienne le moment où je plongerai mon corps dans l’eau sanctifiée du mikvé. C’est ce moment que j’attends, ce sera ma traversée du Jourdain, et alors j’entrerai dans le pays qui nous a été promis. Non, ne croyez pas que je parle d’un territoire, ce n’est pas de cela que je parle. Il s’agit du pays où mon âme a envie de vivre, celui où la Parole maitrise les actes, celui où l’Esprit maitrise la matière, pourvu que ce qui vient d’en-haut soit écouté et obéi.

J’ignore si ce qui traverse mon esprit aujourd’hui est une conséquence de ma prière, de mes actes, ou de mon espérance. Je sais seulement que je me sens bien, que je me sens vrai. Je regarde l’autre rive, là, tout près, à quelques pas. Mais ce n’est pas la rive d’un torrent que je vois, c’est une lumière qui éclaire le monde, et que le monde ne veut pas voir. C’est une fulgurance divine qui fera demain que chacun de mes pas sera sacré, et je verrai dans les yeux de ceux qui ont choisi de voir cette lumière le reflet de leur âme.

Pendant 40 ans j’ai marché dans des déserts d’indifférence, de haine, de doute. Parfois j’ai trouvé une oasis de calme, une source fraîche, et alors j’ai compris qu’il fallait continuer la route. Comme la nuée que les hébreux suivaient jour et nuit, je suis resté attentif aux « signes ». Il est arrivé des moments où je sentais que la Parole s’adressait à moi, et parfois je me trompais. Je n’étais pas seul, et celles et ceux qui m’ont suivi, et celles et ceux que j’ai croisé, et celles et ceux que je suivais, tous ils étaient des témoins, des supports, des amis, et sans eux je n’aurais pas pu marcher si longtemps pour arriver ici aujourd’hui.

Comme Moïse, je voudrais me montrer digne de la parole des sages, porter avec moi tout cet amour que j’ai reçu, que je reçois, et que je recevrai encore, avec je l’espère, un peu de l’humilité qui était la sienne.

Daniel.

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